Dans la série Les anglicismes de l’Office québécois
de la langue française, Carnet d’un linguiste présente : Vélo
stationnaire.
La mission de l’Office québécois de la langue française
(OQLF) comprend la défense de la qualité de la langue au Québec. Elle s’applique,
en particulier, au domaine de la terminologie. La fonction du Grand
Dictionnaire terminologique (GDT) est de fournir des données fiables dans le domaine
de la terminologie française. Malheureusement cet ouvrage véhicule un grand
nombre d’anglicismes.
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Ainsi je consulte, le 1er mars 2012, la fiche « vélo d’exercice », rédigée en 2005.
Dans le champ Équivalent(s), il est dit que l’équivalent
anglais est « stationary bicycle », alors que le correspondant exact est plutôt « exercise bicycle » ou « exercice bike » (plus familier).
Dans le champ Définition, le libellé même de la définition
(« appareil d’entraînement stationnaire ») comprend un anglicisme
de sens.
En effet, selon le Nouveau Petit Robert, « stationnaire » signifie « qui
reste un certain temps à la même place ». Contre-vérification dans The American
Heritage Dictionary of the English Language. « Stationary »
signifie « fixed in a position; not moving ». On comprend pourquoi, en anglais, on peut dire « stationary bicycle », mais pas « vélo stationnaire » en français. Un « vélo
stationnaire » serait un vélo qui reste à la même
place un certain temps (et puis s’en va ?)… La source de
l’anglicisme sémantique est bien là : les signifiants (la forme des mots)
sont identiques en anglais et en français, mais les signifiés (les sens),
différents.
Dans le champ Synonyme(s), le terme « vélo
stationnaire » apparaît sur le même plan que « bicyclette
d’exercice », « vélo d’intérieur » et « vélo
d’appartement ». Seul le terme « bicyclette d’appartement » a
droit à une marque d’usage : il est signalé comme étant rare.
Qu’en est-il dans la réalité ?
D’abord rappelons que l’OQLF a pour mission de veiller à la
qualité du français au Québec. Rappelons également qu’un dictionnaire
terminologique a pour fonction d’indiquer le terme considéré comme le meilleur
par les spécialistes dans un domaine donné. Ce n’est pas un dictionnaire
descriptif, mais normatif.
Un sondage rapide sur Internet montre que les termes les plus fréquents sont, dans l’ordre descendant, 1) « vélo d’entraînement », 2) « vélo d’appartement », 3) « vélo d’intérieur », 4) « vélo d’exercice ». Le terme « vélo stationnaire » se relève presque uniquement en contexte canadien; il est très rarement attesté en contexte européen. Il montre aussi que le terme vélo est beaucoup plus fréquent que bicyclette. Conséquence : « bicyclette d’exercice » et « bicyclette stationnaire » auraient dû être affectés de la même marque « rare » que « bicyclette d’appartement ».
Un sondage rapide sur Internet montre que les termes les plus fréquents sont, dans l’ordre descendant, 1) « vélo d’entraînement », 2) « vélo d’appartement », 3) « vélo d’intérieur », 4) « vélo d’exercice ». Le terme « vélo stationnaire » se relève presque uniquement en contexte canadien; il est très rarement attesté en contexte européen. Il montre aussi que le terme vélo est beaucoup plus fréquent que bicyclette. Conséquence : « bicyclette d’exercice » et « bicyclette stationnaire » auraient dû être affectés de la même marque « rare » que « bicyclette d’appartement ».
Un autre sondage, dans la presse francophone européenne (PFE) cette fois, montre
que « vélo d’appartement » écrase tous les autres termes et que
« vélo stationnaire » est rarissime. Au contraire, dans la presse
francophone canadienne (PFC), c’est « vélo stationnaire » qui
prédomine.
Enfin les deux grandes enseignes européennes d’articles de
sport Go Sport et Décathlon vendent ces produits sous le nom de « vélo
d’appartement ». Même chose pour la grande enseigne de vente par correspondance La Redoute.
Ces coups de sonde suffisent pour affirmer que le GDT
entérine un usage critiquable plutôt que de promouvoir l'usage souhaitable. Le
terme « vélo stationnaire » est critiquable : 1) parce qu’il est
un calque sémantique de l’anglais, 2) parce qu’il ne s’emploie pas
ailleurs dans la Francophonie.
Sur la fiche du GDT, il devrait être déplacé du
champ Synonyme(s) pour être replacé dans celui des Termes non retenus
(c’est-à-dire à bannir) avec la mention « calque de l’anglais ».
Un dernier point, cocasse. La fiche du GDT fournit deux
illustrations du fameux vélo. Ce qui est très bien. Malheureusement, sous l’une
d’elles, on peut lire : « Courtoisie de Planète fitness gym ».
Or, si l’on consulte, dans ce même GDT, la fiche « courtoisie », on note
la remarque suivante : « terme à éviter : courtoisie de »,
justifiée par un commentaire pertinent : « courtoisie de est le calque
littéral de l’anglais courtesy of ».
Visiblement certains terminologues de l’OQLF ne suivent
même pas les conseils qu’ils donnent aux autres…
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J'ai fait une étude détaillée des défauts du Grand Dictionnaire terminologique dans Main basse sur la langue. Idéologie et interventionnisme politique au Québec (Liber, Montréal, 2010),
sous le titre : « Le Grand Dictionnaire terminologique ou Orientation de
l'usage et usagers désorientés », p. 405-443.
Mots-clés : français québécois, terminologie, anglicisme, Grand Dictionnaire terminologique, vélo stationnaire.
Mots-clés : français québécois, terminologie, anglicisme, Grand Dictionnaire terminologique, vélo stationnaire.
Intéressant, je n'avais encore jamais entendu le terme de vélo stationnaire, je suis du Nord Ouest de la France. :-)
RépondreSupprimerMerci pour cet article instructif en tout cas.
Super, j'aime quand on a de jolis mots qui ont du sens ! Je vais replacer appareil d'entraînement stationnaire dès que possible. ;)
RépondreSupprimerBel article, étant dans le domaine, il est toujours intéressant d'en apprendre un peu plus :)
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