Quand
j'étais p'tiot j'aimais aller nadouiller avec les autres chtis. Nous
ramassions des azerottes et chopions des moutelles. Une fois, je m'ai empigé et
j'ai tombé dans la gouille. Il venait tout juste de tomber un gros gareau. En
me relevant, j'ai gaugé… J'étais tripé. Remarquez, vaut mieux tomber dans la
gouille que dans les éronces ou les ortilles…
Une
autre fois, j'ai descendu dans la cave. Je croyais avoir entendu un ravouzeux.
Mais c'était une rate. J'aurais dû laisser la loupiote clairer. Je m'ai beugné
un sacré coup !
En
ce temps-là, il y avait beaucoup d'aigaisses, des crâs, des tia-tias, des
jacques et même quelques houpottes, qui faisaient houp-houp-houp. Les
houpottes, c'est moins méchant que les ouillotes.
Certaines
années, nous chopions des cancouennes pour les faire voler dans la classe ou
nous lancions des cricris. Combien de calottes nous avons eu en récompense de
nos exploits !
Nous
aimions lancer des pignolos dans les cheveux des filles, surtout les plus
peutes, ou glisser des graines de gratte-cul dans leur corsage. Nous mettions aussi
des gravelles dans les souliers du maître. Dans la cour, nous jouions aux
barres et aux gobilles. On a ramassé pas mal de beugnes !
Des fois, nous allions dans le bois ramasser des ételles dans des grandes
charpeignes. Nous avions peur de nous faire piquer par des tavins ou de choper
un loup de bois ou, pire encore, de nous faire mordre par une serpent.
Pour
les quatre-heures, nous avions du pain, deux crans de chocolat et quelques grumes
de raisin. Une fois, nous avons bu en cachette du vin nouveau, du noah, comme
de vrais soûlons. C'était une horrible pistrouille. Elle nous a fichu le virot
et une de ces… drouilles!
Une autre fois, je m'ai plaint d'avoir un chenil dans les yeux. « Un chenil avec
combien de chiens ? » m'a demandé le maître, narquois…
Remarque
: Les défenseurs de la « variation linguistique » considèrent en
général qu'il suffit de préserver l'unité des « structures profondes »
de la langue (qu'ils assimilent à la morphologie et à la syntaxe) pour
maintenir l'intercompréhension entre francophones. On pourrait donc accepter
sans difficulté les « variations de surface » (qu'ils assimilent au
lexique, au vocabulaire).
Le
petit texte qui précède montre, au contraire, qu'on peut très bien respecter
les « structures profondes » du français (le bourguignon est une
variété de français) et produire cependant un message quasiment
incompréhensible pour les non-Bourguignons du fait de la variation lexicale.
Mots-clés : français; variation linguistique; intercompréhension; français régional de Bourgogne; burgundisme; Corberon.