07 mars 2017
06 mars 2017
« Je ne suis pas autiste », un cas de linguistico-politiquement correct...
« Autistophobie »... En ces jours où, pour un
oui ou pour un non, on vous balance au visage des accusations de « phobie »,
voici qu'est apparue une nouvelle « phobie » condamnable. Hier, 5
mars 2017, François Fillon, candidat à la présidentielle française, a déclaré à la télé : « Je ne suis pas autiste, je vois bien les difficultés, j’entends bien
les critiques »,
s'attirant les foudres des associations et d'une ministre.
Dans le Petit
Robert, on lit : « autiste : relatif à l'autisme; par exagération
: Le ministre est autiste sur ce
dossier ». Dans le Trésor de la
langue française, on peut lire : « Autisme : par extension
Forme de repli sur soi, avec refus de la réalité et de la communication avec
autrui ». Le Petit Robert a prévu
le coup. Il se protège en disant « par exagération », alors que le
TLF s'en tient à la mention neutre « par extension »…
Il va falloir réviser ces articles,
scrogneugneu! Expurger les dictionnaires de cette acception supposée véhiculer des stéréotypes. Mais auparavant, les censeurs devront proposer un équivalent linguistico-politiquement
correct à ce sens désormais tabou sinon il y aura une lacune dans le
lexique français.
Pas facile à trouver… On ne pourra pas dire
non plus « Je ne suis pas sourd,
j'entends bien les critiques », ni « Je ne suis pas aveugle, je vois bien le trouble des électeurs » ou encore « Je ne suis pas fou, j'ai assez le sens des réalités », sinon on risquerait d'être accusé de véhiculer des stéréotypes sur les sourds, les aveugles ou les malades mentaux... et d'avoir toutes sortes d'associations bien-pensantes sur le
dos…
Mots-clés : langue française;
linguistico-politiquement correct; stéréotype; autiste; autistophobie; aveugle; fou; sourd;
François Fillon.
01 mars 2017
Doit-on dire « bannière » ou « enseigne », « bannière » ou « banderole », « bannière » ou « bandeau »?
On observe dans les médias québécois trois emplois
du mot « bannière » dans une acception incorrecte sous l'influence de
l'anglais banner.
Dans le premier cas, il s'agit de désigner un
bandeau publicitaire qui défile sur
une page web ou tout autre document numérique. Cet emploi fautif se rencontre
aussi en Europe francophone. En voici un exemple québécois :
Dans le deuxième cas, il s'agit de nommer la raison sociale d'une société commerciale ayant plusieurs établissements, autrement dit, le nom sous lequel elle est connue du public. Par exemple Couche-tard, Jean Coutu, etc. Voici un exemple d'emploi fautif :
« L'opposition
à l'Hôtel de ville a présenté ce matin une compilation des variations de taxes
de nombreux commerces installés à Montréal. Leurs [sic] chiffres indiquent que
plusieurs grandes bannières ont
obtenu une baisse de taxes après avoir vu la valeur de leurs bâtiments
réévalués à la baisse. »
(La Presse, 28 février 2017). En réalité, il fallait dire plusieurs grandes enseignes.
Dans le troisième cas, il s'agit de désigner une bande de tissu portant une inscription
(politique, syndicale, commerciale ou autre). Voici un exemple fautif :
« L'Association
québécoise des centres de la petite enfance […] dénonce vivement les
compressions de 120 millions $ annoncées par le gouvernement. La campagne a été
lancée avec le dévoilement de la
bannière qui sera installée devant certains CPE. » (Le
Peuple, 14 janvier 2017). Dans ce cas, il fallait dire la banderole.
Dans ces trois cas, il y a un point commun : il
s'agit de désigner un support (en tissu, en bois, en métal, en plastique) portant
une indication (marque personnelle, marque d'une confrérie, d'une paroisse ou
d'un commerce). En français, on distingue trois cas.
![]() |
| La bannière de Jeanne d'Arc. |
| Bannières d'une procession religieuse. |
![]() |
| Une banderole. |
Le mot enseigne
désigne 1. un panneau portant une inscription ou un dessin placé à la devanture
d'une boutique pour attirer l'attention des clients - Les boutiques du vieux Québec ont de belles enseignes à l'ancienne 2. la raison sociale d'une entreprise commerciale dont dépendent plusieurs
établissements - Alors que les petits
commerces restent dans le centre-ville, les grandes enseignes s'installent dans
la banlieue.
![]() |
| Une enseigne du vieux Québec. |
Exemples de grandes enseignes : Costco, Couche-tard, Jean Coutu, McDonald's, Ikea, Petro-Canada,
Starbucks Coffee, Wall-Mart, etc.
![]() | ||||
| Une grande enseigne américaine, la société Starbucks Coffee. |
![]() |
| Bandeau publicitaire. |
Mots-clés : français; français
québécois; impropriété; anglicisme; anglicisme sémantique; bannière; bannière
publicitaire; enseigne; banderole; calicot; bandeau.
28 février 2017
Doit-on dire « amasser de l'argent » ou « récolter, recueillir, collecter de l'argent » ?
On observe fréquemment dans les médias
québécois un emploi impropre du
verbe amasser en combinaison avec
les noms argent ou fonds. En voici un exemple :
« Lancée à la
mi-janvier, la compagne de financement […] a presque doublé son objectif de
2000 $ puisque 3886 $ ont été amassés
jusqu'à maintenant […]. C'est d'ailleurs en partie la raison pour laquelle il
s'agissait d'un montant modeste à
amasser. » (Ici Radio-Canada Gaspésie, 28 février
2017).
Dans un tel contexte, cet emploi
d'amasser est une impropriété. En effet, en français, ce verbe signifie « réunir en quantité considérable, par additions successives,
accumuler. » Ce qui, visiblement, n'est pas le cas. Voici un exemple
d'emploi correct :
« Adapter
le plus grand fonds souverain au monde actuel. C'est avec cet objectif en tête
que le gouvernement norvégien a proposé des changements dans les règles de
gestion de la cagnotte amassée depuis
deux décennies, qui compte désormais plus de 840 milliards d'euros. » (Les Échos, 20
février 2017).
On pourrait penser qu'il s'agit d'une
influence de l'anglais, mais ce ne semble pas être le cas. En effet, en anglais
to amass signifie « to get a large amount of something, especially
money
or information,
by collecting it over a long period. »
Dans cette langue, comme en français, le verbe
comporte les sèmes (ou unités
minimales de signification) « grande quantité » et/ou « longue
période ».
Quand l'un ou l'autre de ces deux sèmes ou les deux
à la fois sont absents du contexte, on dira simplement récolter ou recueillir
de l'argent. Si, en plus, le sème « don » ou « donner au profit
de quelqu'un » est présent, on dira collecter de l'argent. Voici
des exemples d'emplois corrects :
« Il y a tout un
mouvement de solidarité qui s'organise à Québec pour aider la communauté
musulmane. On s'affaire notamment à recueillir
de l'argent pour soutenir financièrement les familles éprouvées. » (TVA Nouvelles,
31 janvier 2017).
« La Fondation Jean Lapointe
lance le défi 28 jours sans alcool. Depuis quatre ans, cette activité vise à
faire prendre conscience de la façon de consommer des gens. C'est aussi un
moyen de récolter de l'argent pour
sensibiliser les adolescents au risque de la consommation d'alcool et de
drogue. » (Ici Radio Canada
Nouvelles, 5 février 2017).
Mots-clés : français; français québécois; impropriété; amasser; to amass; récolter; recueillir,
collecter (de l'argent, des fonds).
18 février 2017
Peut-on dire « endosser quelqu'un ou quelque chose » ?
Dans une lettre au
journal La Presse, le philosophe
Charles Taylor a écrit : « Je
vois qu'il est question ces jours-ci d'adopter une des recommandations du
rapport Bouchard-Taylor, soit celle qui interdit le port des signes religieux
par ceux qui exercent les fonctions dites "coercitives" de l'État,
dont les juges et les policiers. J'ai bien signé le rapport où cette
recommandation paraît ; mais neuf ans plus tard, je ne l'endosse plus. » (La
Presse, 14 février 2017).
Il s'agit là d'un
emploi fautif du verbe endosser, un
anglicisme de sens ou anglicisme sémantique.
En effet, en anglais to
endorse signifie : « to
express formal support or approval for someone or something ». Ce qui
correspond en français à appuyer, adhérer à, souscrire à.
Tandis qu'en français
endosser signifie : « prendre ou accepter la
responsabilité de quelque chose, assumer la responsabilité de quelque chose, se
charger de quelque chose. »
En réalité, Charles Taylor voulait dire qu'il n'adhérait plus à la recommandation en question, qu'il n'y souscrivait plus, qu'il ne la soutenait plus.
On peut excuser cet anglicisme chez un anglophone,
mais ce qui est moins excusable, c'est que pratiquement tous les journalistes
francophones qui ont repris la nouvelle, ont repris également l'anglicisme…
Mots-clés : français québécois; anglicisme; anglicisme
de sens; to endorse; endosser.
16 février 2017
Doit-on dire Université de Laval ou Université Laval ?
Dans la presse francophone européenne, on
trouve Université de Laval (dans 27 % des cas) et Université Laval (dans
72 % des cas). En fait on dit bien Université Laval. En effet cette
université, située à Québec même, est nommée en l'honneur de Mgr
François de Montmorency-Laval, premier évêque de la Nouvelle-France
(1623-1708). À part le nom, elle n'a rien à voir avec la ville de Laval (425
000 habitants) située en banlieue nord de Montréal. Elle n'a rien à voir non
plus avec Pierre Laval (1883-1945), chef du gouvernement français (1942-1944) qui
a collaboré avec les Allemands. On doit donc dire Université Laval.
Mots-clés : nom d'université; Université
Laval; Québec.
Doit-on dire Université de Harvard ou Université Harvard?
Dans la presse francophone européenne, on
trouve Université de Harvard (dans 59 % des cas) et Université Harvard
(dans 41 % des cas). Cela veut dire que la forme fautive est plus
fréquente que la forme correcte… En effet Harvard
University n'est pas une université qui serait située dans une ville de
Harvard, mais une université nommée d'après le nom d'un pasteur puritain, John
Harvard (1607-1638), qui a légué sa bibliothèque et ses biens à cet établissement
situé à Cambridge dans la banlieue de Boston (Massachussetts). Il faut donc
dire Université Harvard.
Mots-clés : traduction anglais-français;
Harvard University; Université Harvard.
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