01 novembre 2019

De la qualité de la langue sur les emballages au Québec


J'ai déjà décrit dans Le français québécois entre réalité et idéologie (voir mon billet dans ce blog) le rôle de la traduction dans la création et la propagation des anglicismes. Au Québec, pratiquement tous les textes des emballages de produits courants sont des traductions de l'anglais. Ce qui veut dire qu'ils comportent beaucoup d'anglicismes sous forme de calques. Mais il y a un autre phénomène, qui va à l'encontre de la qualité du français. Sur les emballages, la disposition des textes calque celle du texte anglais, autrement dit calque l'ordre syntaxique anglais. Ce qui donne une syntaxe française aberrante. Un cas fréquent concerne la place de l'adjectif, antéposé en anglais, postposé en français. En voici un exemple simple, mais parlant sur un emballage de la société Windsor (K+S Windsor Salt Ltd.) : l'anglais Iodized Table Salt donne ce barbarisme Iodisé Sel de table... Il faudrait faire comprendre aux entreprises qu'elles doivent respecter l'ordre des mots normal en français sur leurs emballages. Tous les jours, les francophones doivent subir ce massacre de leur langue. Il sera urgent que l'Office québécois de la langue française s'attaque à ce problème.

Mots-clés : traduction anglais-français; qualité de la langue; Québec; emballages produits courants; disposition du texte; syntaxe; ordre des mots; sel de table Windsor; Office québécois de la langue française.

23 octobre 2019

Un être humain peut-il être « dévasté » ?

L'emploi de l'adjectif « dévasté », appliqué à une personne, s'est répandu dans les médias aussi bien au Québec qu'en France. « Il est dévasté par cette terrible nouvelle ». Dans cet emploi, il s'agit d'un anglicisme de sens. En anglais, devasteted, appliqué à une personne, signifie « extremely upset and shocked ». En français, une ville, une région, un pays peuvent être dévastés (par une guerre, un cataclysme naturel), pas un être humain. Pour exprimer un état de choc profond à la suite d'un événement tragique, on dispose en français des adjectifs accablé, anéanti, démoli, effondré.

Mots-clés : anglicisme de sens; devasteted; *dévasté; accablé, anéanti, démoli, effondré.

21 octobre 2019

Comment traduire courtesy of ?

Il est assez agaçant de lire, comme cela arrive souvent, sur les cartels de grandes expositions de peinture, l'expression courtesy of (The National Gallery, etc.) pour désigner le prêt souvent gracieux d'une œuvre d'art. Il est pourtant facile de trouver des équivalents français à cette formulation anglaise, par exemple : (exposé, publié, etc.) avec l'aimable autorisation de ou (prêté) à titre gracieux par. S'il s'agit d'un don, on peut dire offert par.

Mots-clés : traduction anglais-français; anglicisme; courtesy of; avec l'aimable autorisation de; à titre gracieux par; offert par.

19 octobre 2019

La « clause (du) grand-père » ou comment doit-on traduire « grandfather clause » ?


La traduction de l'expression anglaise grandfather clause pose un problème. Au Québec, depuis des lustres, on l'a traduite par clause grand-père. Cette expression, qui est un calque pur et simple de l'anglais et n'évoque rien pour un francophone, vient  de faire son apparition en France, aussi sous la forme clause (du) grand-père, à l'occasion du débat sur la réforme des retraites. En fait il existe deux équivalents français : clause d'antériorité et clause des droits acquis. ...






« Le haut-commissaire aux Retraites Jean-Paul Delevoye invité sur France 2 ne serait pas favorable à l'option consistant à appliquer la réforme des retraites en cours d'élaboration aux seuls nouveaux entrants, dite « clause grand-père ». Une option pourtant défendue par Emmanuel Macron pour tenter de calmer la grogne sociale. » (Le Parisien, 29 octobre 2019).

Je mets en ligne le billet que j'avais préparé pour Qub radio le 8 février 2019.

...

Ces temps-ci, dans le cadre du débat sur le projet de loi portant sur les signes religieux, on entend beaucoup parler de « clause grand-père » (637 résultats sur le site de l'Assemblée nationale du Québec pour toutes les périodes).

Cette expression est obscure pour tout francophone. Elle n'évoque rien de bien clair, rien de bien précis. On se demande ce que le « grand-père » vient faire là ?

En fait c'est un calque littéral de l'anglais grandfather clause. Cette expression est motivée en anglais, c'est-à-dire qu'on peut en retracer l'origine et en comprendre le sens. Elle renvoie à l'histoire des États-Unis. De la fin du XIXe siècle jusqu'au début du XXe siècle, pour empêcher que les Noirs puissent voter, certains États sudistes avaient adopté des lois qui accordaient le droit de vote seulement à ceux dont le grand-père avaient le droit de voter avant la guerre de Sécession (The Civil War, 1861-1865). Si vous aviez un grand-père qui avait le droit de voter à cette époque-là, vous aviez vous-même ce droit. Bien évidemment cette disposition éliminait d'emblée tous les Noirs, dont tous les grands-parents étaient alors esclaves…

L'expression est encore courante en anglais. De nos jours, de quoi s'agit-il ? C'est une « disposition permettant à une catégorie donnée de personnes de ne pas être assujetties à une nouvelle loi […] en raison des droits dont jouissaient ces personnes avant que cette loi […] n'entre en vigueur. » (Termium).

Par quoi devrait-on remplacer cet anglicisme obscur ?

Pour une loi, on parlera de clause d'antériorité (cf. Robert & Collins) - au nom du principe de non-rétroactivité des lois - ou de clause des droits acquis (cf. Baleyte J. et al., Dictionnaire économique et juridique).



Mots-clé : traduction anglais-français, calque, grandfather clause, *clause grand-père, *clause du grand-père, clause d'antériorité, clause des droits acquis.


16 octobre 2019

Gallophobie ordinaire

Lu par hasard :
« Car depuis au moins deux générations, l’évolution naturelle du français est bloquée à la fois par les excès de purisme parigocentriste, mais aussi par l’"anglolâtrie" des cercles de pouvoir à Paris, faisant le jeu de tous les détracteurs du français comme langue moderne et internationale. »
Jean-Benoit Nadeau, Le Devoir, 30 septembre 2019.
JBN devrait nous expliquer ce qu'il entend par « évolution naturelle du français » et aussi comment deux tendances opposées - purisme et laxisme - peuvent empêcher cette « évolution naturelle ». 
Mots-clés : Jean-Benoit Nadeau; idéologie linguistique; gallophobie.

Statistiques linguistiques


Pour ceux et celles que les statistiques linguistiques intéressent, je signale les données des recensements canadiens publiées par Statistique Canada (deux versions, anglaise et française). Elles donnent un excellent tableau des langues parlées au Canada, de leur utilisation  et de leur évolution.
Les questions portent sur la "connaissance des langues officielles" (l'anglais et le français), la "première langue officielle parlée" (anglais ou français ou "anglais et français" ou "ni anglais ni français"), la "langue maternelle" (anglais, français, autre langue : toute une série de langues est fournie, dont les langues autochtones, les langues étrangères), les "autres langues parlées régulièrement à la maison", "langue utilisée au travail", etc.
Voici la définition de la "connaissance d'une langue officielle" pour le recensement canadien : « désigne la capacité d'une personne de soutenir une conversation en anglais seulement, en français seulement, dans les deux langues, ou dans ni l'une ni l'autre. Dans le cas d'un enfant qui n'a pas encore appris à parler, cela comprend les langues que l'enfant apprend à parler à la maison. »
Les recensements sur le site de Statistique Canada :
Le profil du recensement de 2016 pour le Québec :
On se plaît à rêver que d'autres pays francophones aient un tel instrument d'analyse. On aurait une meilleure idée du nombre exact de francophones dans le monde.

Mots-clés : statistiques linguistiques; Canada; Québec.

20 septembre 2019

Comment doit-on prononcer le nom de famille de Greta Thunberg ?


On entend souvent à la radio et à la télévision le nom de famille de Greta Thunberg prononcé à l'anglaise /teune-bèrgue/ avec un /eu/. C'est une erreur. Greta Thunberg est suédoise et son nom, en français, doit se prononcer /toune-bèrgue/ avec un /ou/. En suédois, il se prononce exactement comme ceci [ˈtʉːnbærj]. Voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Greta_Thunberg.


Mots-clés : Greta Thunberg, nom de famille, prononciation.